Le thème choisi pour la quatorzième session du Carrefour d’histoire religieuse, « Églises et pouvoirs», s’accorde parfaitement avec la ville d’accueil : Poitiers. Cette cité qui associe les richesses de son passé médiéval et la modernité des techniques de communication et dont l’université demeure l’un des fleurons de son histoire, a été et demeure un point de contact et d’expression du rapport entre religion et politique.
C’est en 1992 que la première session de ce qui devint le Carrefour d’histoire religieuse, voulu et conçu par un journaliste Jean-Yves Riou et deux professeurs d’histoire contemporaine, Gérard Cholvy et Yves-Marie Hilaire, s’est tenue à Bruxelles. L’apport des chrétiens à la construction de l’Europe : tel était l’un des thèmes alors traités.
Depuis un siècle, l’État s’est doublement émancipé de la «tutelle» religieuse : le centenaire de la loi de Séparation de 1905 signe la confirmation de l’indépendance du politique et du religieux institutionnalisé, et l’hégémonie culturelle, au sens gramscien du terme, de l’Église catholique, notamment sur la société, est battue en brèche par la sécularisation triomphante.
Pourtant, la réalité n’est pas aussi «évidente», y compris dans l’Hexagone. Qui n’a pas constaté cet intérêt marquant pour toute information relative aux derniers jours et aux funérailles du pape Jean-Paul II décédé en avril 2005 ? Quel citoyen n’a pas été concerné, interpellé, et souvent choqué voire révolté par les attentats aveugles perpétrés en juillet 2005 à Londres en écho à ceux de Madrid du 11 mars 2004 et en référence au 11 septembre 2001 à New York ? La composante religieuse s’affiche dans les propos des extrémistes qui les revendiquent. D’ailleurs le phénomène religieux dans toutes ses dimensions affectives, politiques et culturelles peut-il se cantonner à la sphère privée ? Comment constituer une société qui serait composée, comme le souligne Émile Poulat, de 60 millions de consciences totalement autonomes ?
Un dernier élément peut s’ajouter à ce cocktail disparate de constat et de réaction. Dans une France clairement sécularisée, 78 % de ses membres s’affichent voire revendiquent une appartenance portant sur 25 000 personnes pour le compte de La Croix du 24 décembre 2001 au point que Bruno Frappat commençait son éditorial par ces mots : « heureux comme Dieu en France ». Le thème « Églises et pouvoirs » s’imposait donc par son actualité et par le lieu choisi pour cette session.

Bruno BÊTHOUART


Actes de la XlVe université d’été du Carrefour d’histoire religieuse, Poitiers (11-14 juillet 2005)
F. ARS, M. AURELL, B. BÊTHOUART, P. BLAUDEAU, X. BONIFACE, J. BOUQUET, J. CHAUNU, F.-P. CHANUT, J.-L. CLÉMENT, T. DESWARTE, M. FAUQUIER, F. GONDRAND, J. GRÉVY, K. GROSSE KRACHT, A. DE LA BROSSE, L. LALOUX, F. LE MOIGNE, B. MARTIN, G. PELLETIER, M. ROUCHE, A. ROUET, É. THÊVENIN, F. VIGIER.

15 euros